Au Pays Basque français, dans la province de Soule à la limite du Béarn, se trouve le château de Trois-Villes. Daté de 1660-1663, il est attribué à François Mansart.
L’attribution de ce château au Grand Mansart parait bien séduisante car le propriétaire, Armand-Jean de Peyre, comte de Trois-Villes (ou de Tréville) (1598-1672), était le capitaine-lieutenant des mousquetaires du roi, bien connu par l’œuvre d’Alexandre Dumas père.
L'inventaire de ses papiers à son décès atteste qu'il était lié à la clientèle de l'architecte (actes passés avec les Guénégaud, Montmorency-Luxembourg, Condé …) et, bien sûr, à la famille royale par ses fonctions.
Son hôtel parisien, rue de Tournon (n° 33), détruit en 1938, se trouvait juste devant le palais du Luxembourg où logeait Gaston d’Orléans, frère de Louis XIII, client assidu de l'architecte (châteaux de Limours et de Blois). Il voisinait, par-derrière, avec l’hôtel de Condé dont les remaniements par François Mansart sont contemporains de la construction du château.
Le bâtiment présente, étrangement, des traits tantôt modernes (combles mansardés, brisés à la base), tantôt traditionnels (croisées à meneaux - rétablis au XXe siècle -, traduction locale en pierre des croisées à croisillons en bois du moment ; frontons cintrés et triangulaires issus de la tradition maniériste), autant d'éléments pratiqués par François Mansart à différents moments de sa carrière.
On retrouve également les beaux effets de contrastes et de décrochements de son architecture, les chambranles subtilement profilés, les bandeaux d’étages, les refends et chaînages d’angle, autant d'éléments chers à François Mansart que caractéristiques de l’architecture française du milieu du XVIIe siècle. C'est là toute l'ambigüité de la situation.
Ajoutons que les éléments, tels que frontons, bandeaux d'étage, chainages d'angle sont, en outre, fort bien profilés comme l'attestent les clichés ici présentées. Qualité des profils qui entraient parmi les préoccupations du grand architecte sur ses chantiers.
Si le château fut assurément bâti par des entrepreneurs locaux, il y a de fortes probabilités que le comte de Tréville, personnage important de la cour de Louis XIII, puis de Louis XIV, ait souhaité des plans et élévationspar un architecte éminent, tel François Mansart, qu'il avait sous la main.
Le projet fut corrigé ensuite afin de répondre au goût du propriétaire et aux traditions locales. On retrouve là ce qui se produisit plus tard, au XVIIIe siècle, entre Léon Brethous et Juste-Aurèle Meissonier à Bayonne (voir notice).
Le comte de Tréville pouvait ainsi s’enorgueillir d’avoir un château conçu par le célèbre Mansart, mis à son goût.
Rappelons que Tréville avait déjà employé des artistes notables : il s'était fait portraiturer par une autre grand nom des arts au XVIIe siècle : Antoine Le Nain. Aîné des trois frères, il était en charge des portraits – un des genres majeurs de la peinture au XVIIe siècle – en tant que chef de l'atelier familial à Paris.
Longtemps non localisé, ce portrait a pu être identifié dans la collection Wildenstein à New York à l'occasion de l'exposition présentée au Fine Arts Museum de San Francisco (octobre 2016 - janvier 2017)*. L'attribution à Antoine plutôt qu'à Mathieu a été confirmée.
François Mansart fut aussi probablement le concepteur des jardins en terrasses et du canal du Gave du Saison, au bas du château, tels qu’on peut les observer, noin de là, à Coarraz, en Béarn.
Le grand architecte était aussi jardinier, rappelons-le : les exemples de jardins avec cours d'eau (rivière ou canal) en bas d'une terrasse sont bien connus dans son oeuvre : châteaux de Berny, Blois, Maisons, Soisy, Fresnes ...
*Portrait non présenté à l'exposition du Louvre-Lens (mars-juin 2017).