Mansart de Sagonne : un projet de palais royal pour Lisbonne (1756)

Il est des publications qui sont un honneur, une distinction, une récompense. 

À une période où les récompenses sont attribuées parfois sur on-ne-sait quel critère, être publié par une université étrangère et son éminent comité scientifique* est en effet des plus flatteurs : c’est la reconnaissance de son travail hors de France.

Parution, ce mois de mars 2025, dans Modus Operandi, actes du symposium "História de Arte Hoje" organisé par l’Université de Lisbonne, les 14-16 novembre 2022, de mon article : "Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne à Lisbonne. Un projet stratégique de palais royal pour la diplomatie française" (p. 233-263).

Ce symposium fut organisé en hommage à l’éminent historien et critique d’art portugais, José Augusto França (1922-2021), à l’occasion du centenaire de sa naissance. Lors de mes recherches en 1998, j’eus l’honneur de m’entretenir avec ce spécialiste de la Lisbonne du XVIIIe siècle, fort sympathique et ouvert aux doctorants étrangers.

 

                                           José Augusto França (1922-2021)

 

Le projet de palais royal en question fait suite au tremblement de terre survenu à Lisbonne à la Toussaint 1755, si bien évoqué par Voltaire dans Candide (1759). Si l’on ne dispose pas, malheureusement, des plans et élévations, en revanche, une documentation non négligeable – correspondance diplomatique et des Bâtiments du roi, actes notariés – est conservée.

Souvent abordé par de nombreux historiens ou historiens de l’art (Réau, Cordeiro de Souza, França, Gallet), le sujet ne fut traité que de manière succincte. Il m’appartenait de l’approfondir en établissant les tenants et les aboutissants. Ce fut ainsi l’occasion de faire le point sur la situation artistique et diplomatique des monarchies française et portugaise à la veille de la Guerre de Sept-Ans (1756-1763).

 

     Le palais royal de Lisbonne et le Terreiro do Paço avant le tremblement de 1755, anonyme, XVIIIe siècle, Lisbonne, Museu da Cidade.        Le palais royal de Lisbonne après le tremblement de 1755, anonyme, 1756, estampe, Lisbonne, Museu da Cidade.

 

On verra comment Louis XV entendit se servir de sa passion, l’architecture art ô combien emblématique de l’influence française en ce milieu des Lumières dans le contexte des grands chantiers du règne (place Louis XV de Paris, actuelle place de la Concorde, notamment) – afin de s’allier ou, à défaut, de neutraliser une puissance alliée de l’Angleterre depuis le début du siècle, faisant de ses architectes de véritables agents diplomatiques.

Si le séjour de Mansart de Sagonne en 1756 fut contrecarré par ses prétentions indécentes, la poursuite des secousses et le début du conflit en mai, l’architecte du roi se rendra bien dans la péninsule ibérique plus d’une dizaine d’années plus tard, en 1767-1769, afin de défendre ses projets de canaux en Espagne et de palais royal à Lisbonne. L’intérêt du roi Charles III pour les premiers l’empêcha de pousser plus avant.

 

                                        Gaspard Frois Machado, la place du Commerce d’après le projet d’Eugenios dos Santos, XVIIIe siècle, estampe, Lisbonne, Museu da Cidade.

 

On verra aussi comment l’ex-infante Marie-Anne-Victoire d’Espagne, mariée de force à Louis XV en 1721, alors âgée de 3 ans, renvoyée indécemment dans ses foyers en 1725 et devenue reine de Portugal, n’oublia pas l’humiliation subie lorsque le roi de France proposa son aide financière à la couronne portugaise.

Il s’agit là de ma cinquième publication étrangère et de la troisième dans la péninsule ibérique, après celles de Madrid en 2001 ("Archivo español de Arte", n°293) et de Salamanque en 2019 ("Cuadernos dieciochistas", vol. 20).

J’exprime toute ma gratitude à l’Institut d’Histoire de l’Art de la Faculté des Humanités de Lisbonne, ainsi qu’à son comité scientifique, pour cette importante parution.

Article consultable ici.

* https://calenda.org/970869

 

                                                         Philippe Cachau, article Lisbonne, 2024 (2025), p. 1

 

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