Ce qu’il y a de fascinant chez les Mansart, c’est que l’on n’est jamais au bout de ses surprises ! Leurs créations et leur génie sont infinis.
Connaissez-vous la « Porte du Nord » ou « Entrée du Roi » de Maisons ?
Sise aux limites des domaines de Maisons-Laffitte et de Saint-Germain-en-Laye, à deux pas du pavillon de la Muette, pavillon de chasse réputé de Louis XV, elle est sans doute l’une des créations les plus mal traitées des historiens des Mansart et des jardins aux XVIIe-XVIIIe siècles1.
En 2009, Béatrice Vivien, actuelle adjointe à la culture de la ville, historienne des Longueil et du château de Maisons, y consacra un long article. Elle y fait une analyse solide, illustrée de nombreux plans et documents anciens des Archives Nationales et du fonds documentaire de l’Association syndicale du Parc de Maisons-Laffitte (ASP). On le lira avec grand intérêt dans le fichier ci-dessous. L’auteure s’étend peu cependant sur l’aspect qui nous intéresse également : qui de François Mansart ou de Jules Hardouin-Mansart est l’auteur de cet ensemble remarquable ?
Les deux serons-nous tentés de dire. En effet, si le projet naît à la fin de la carrière du Grand Mansart, à partir de 1658, il fut repris et parachevé par son petit-neveu Jules Hardouin-Mansart jusqu’en 1670. On sait comment le jeune architecte s’était formé sur les chantiers de son grand-oncle et combien il en assura l’achèvement après son décès2. Maisons ne faillit pas à la règle. On peut même se demander si certains des pavillons déployés-là ne sont pas de la main même de l’architecte de Louis XIV comme indiqué plus bas (?).
Inscrite dans la grande perspective du château de Maisons, sans aucun doute la plus longue - près de 2 500 m (2 400 exactement) - et la plus belle du royaume avant l’avenue de Paris de Versailles, cette entrée témoigne du génie conceptuel de François Mansart en matière de constructions et de jardins. Son objet fut le suivant : comment conserver l’infini d’une perspective, sans murs, grilles ou clôtures d'aucune sorte, tout en la protégeant des intrusions extérieures ?
Son ingénieuse composition surpasse assurément tout ce que Le Nostre créa en la matière. Cette entrée atteste ce que celui-ci dut au Grand Mansart en même temps que la rivalité ‒ amicale ‒ qui animait les deux hommes : qui de l’un ou de l’autre éblouirait le plus le spectateur par l'audace de ses créations ? Jamais, en effet, on ne vit saut-de-loup si beau et si complexe.
François Mansart sut protéger là magnifiquement le domaine de Maisons de la faune et des intrus sans nuire à la perspective souhaitée. Béatrice Vivien rappelle que, contrairement aux bois visibles aujourd’hui et qui barrent la vue, la grande allée de Maisons ouvrait sur un vaste paysage de landes.
La composition de cette entrée en forme de petit bonhomme tient autant du génie civil que militaire avec ses beaux jeux de renfoncements, ses fossés droits et circulaires, ses pavillons bas en forme de bastions, avec grandes salles voûtées, qui enserrent le vaste hémicycle clôturant la perspective en contre-bas.
Les six pavillons initiaux en hauteur, tout comme les grilles qui les précèdent, sont caractéristiques de ce style Mansart bien connu, fait d’originalité et du goût prononcé des ressauts.
En matière d’originalité, le pavillon de garde qui subsiste de nos jours présente une élévation rompant à plaisir avec la tradition : au lieu d’une élévation uniforme traditionnelle, l’architecte a choisi de déployer au centre une grande niche en anse de panier, à la manière d’un portail ou d’une porte cochère, pour abriter deux baies en renfoncement et un balcon au-devant dans un jeu de va-et-vient.
Comme il se doit, ce pavillon fut couvert d’un comblé brisé, dit alors « à la Mansart ». Si le brisis du comble en partie basse entre bien dans la tradition de François Mansart, en revanche la nature des lucarnes à ailerons et le style général de la construction, avec ses parements de fausses briques, inclinent pour une réalisation d’Hardouin-Mansart. Ou, disons plutôt, qu’il s’agirait d’une réalisation du premier revu et corrigé par le second si l’on prend en considération le rythme alterné des modillons sous la corniche, originalité plus propre à François qu’à Jules Hardouin. Ce pavillon évoque en effet immanquablement les constructions en vigueur à Versailles sous Louis XIV.
Comme il se doit, ce pavillon fut couvert d’un comblé brisé, dit alors « à la Mansart ». Si le brisis du comble en partie basse entre bien dans la tradition de François Mansart, en revanche la nature des lucarnes à ailerons et le style général de la construction, avec ses parements de fausses briques, inclinent pour une réalisation d’Hardouin-Mansart. Ou, disons plutôt, qu’il s’agirait d’une réalisation du premier revu et corrigé par le second si l’on prend en considération le rythme alterné des modillons sous la corniche, originalité plus propre à François qu’à Jules Hardouin. Ce pavillon évoque en effet immanquablement les constructions en vigueur à Versailles sous Louis XIV.
Voir également : Béatrice Vivien, Les demeures et collections d'un grand seigneur : René de Longueil, Président de Maisons (1597-1677), thèse d'histoire de l'art, Claude Mignot (dir.), soutenue en décembre 2014.
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1.Evoquée sommairement dans le dernier ouvrage de Claude Mignot sur François Mansart, paru en 2016.
2. Voir les ouvrages de Bertrand Jestaz et d'Alexandre Gady en 2008 et 2010 et le nôtre, à paraître, réactualisation de ces ouvrages.