Vous aimez le XVIIIe siècle, l’Angleterre de Barry Lindon, le comte d’Artois et son entourage (Radix de Sainte-Foy, Polignac, Pérusse des Cars), le marquis de Voyer, le cheval, l’architecture de François-Joseph Bélanger (1744-1818) ?
Parution, ce début de mois, dans le "Bulletin des Amis du château de Maisons", n° 18, de mon article sur la relation méconnue de Charles-Philippe de France, comte d’Artois (1757-1836), futur Charles X, avec Marc-René de Voyer d’Argenson (1722-1782), dans le cadre de l’exposition "Le comte d’Artois, prince et mécène" (14/11/2025 – 02/03/2026).
Un article dense et complexe que j’ai pris grand plaisir à écrire, sans doute l’un de mes plus "stupéfiants". On découvrira en effet les liens étroits du marquis de Voyer avec : Bélanger depuis ses débuts comme élève de Julien-David Le Roy ; le duc de Lauraguais, pionnier du pur-sang anglais en France, protecteur de l’architecte ; la cantatrice Sophie Arnould, maîtresse de Lauraguais, puis de Bélanger ; et, surtout, avec l’élite anglaise du temps dont les lords Shelburne, Clermont, Rockingham, premier ministre de S.M. ; et bien d’autres personnalités. Liens qui retinrent l’attention d’Artois dans ses projets d’écuries et de haras à Maisons, Paris, Fontainebleau (...).
Cet article remet en perspective les travaux de Nicole de Blomac sur l’activité fondamentale du marquis de Voyer en matière de cheval en France au XVIIIe, d’abord principal conseiller du duc de Chartres, futur Philippe-Égalité, puis celui de son cousin Artois, en matière d’achat et de production de pur-sang pour leurs écuries respectives.
L’activité anglaise de Bélanger a été réexaminée à la lumière des correspondances de Voyer avec ses amis Chambers, Le Roy et Shelburne, conservées dans le fonds d’Argenson de Poitiers. La date de 1775 comme premier séjour de l’architecte en Angleterre, telle qu’avancée par Jean Stern en 1930, mais contestée par Janine Barrier en 1990, se voit ainsi confortée.
Découvrez aussi les liens privilégiés du marquis avec l’entourage du comte d’Artois, dont et surtout Jean-François de Pérusse, duc des Cars (1747-1822), qui fit, dans ses mémoires, une passionnante relation de l’accueil réservé par Voyer à Artois au château des Ormes en 1777. L’acquisition conjointe du duché de Châtellerault avec Pérusse des Cars en 1770 est aussi une révélation.
Cet article, c’est enfin l’évocation du rôle de Voyer dans l’éducation du duc de Chartres, la renaissance des courses en France sous Louis XVI et la naissance du Prix du Roi à Vincennes en 1781 ; des échanges entre Voyer et Polignac, 1er écuyer d’Artois, directeur des haras du roi, en matière d’acquisition et d’envois de chevaux aux Ormes depuis l’entrepôt général des haras d’Asnières, créé par le marquis en 1752-55.
Cerise sur le gâteau : un portrait inédit de celui-ci en ouverture de propos.
Enjoy !
   
article Artois - Voyer, Bulletin-Amis-Château-de-Maisons, n°18, 2025, pdf 
C’est un aménagement assez symptomatique de la France Macron, celle du "en même temps", de l’entre-deux, du milieu, avec et sans lustres, et de la façon dont on peut vendre un pseudo-état au public et aux médias.
Quand on est conservateur du château de Versailles, on ne peut être banal et réduire la galerie des Glaces à n’importe quelle galerie !
Versailles n’est pas un monument quelconque. C’est le lieu de l’excellence française dans tous les domaines : architecture, peinture, sculpture, arts décoratifs, jardins, urbanisme, musique, théâtre, littérature, horticulture, sciences, art équestre, bref la plus sublime expression des deux périodes les plus glorieuses de notre Histoire : le Grand Siècle et le Siècle des Lumières.
L’aménagement de la galerie des Glaces opéré à la fin des années 1970, inauguré en 1980 en même temps que la chambre du roi, entendait redonner au château de Versailles, démeublé par la Ière République en 1793-1794, toute sa magnificence d’Ancien Régime, à savoir celle d’octobre 1789, départ de la cour, dernier état historique attesté.
Une date qui fut arrêtée par Pierre de Nolhac (1859-1936) à la fin du XIXe siècle en vue de la restitution des appartements royaux du corps central1 tandis que l’on conservait le musée historique de Louis-Philippe dans les ailes nord et sud. Les aménagements susdits faisaient suite, rappelons-le, à celui de la chambre de la reine, inauguré en 1976. Un évènement qui fait toujours sensation !
Pour parvenir à ses fins, Gérald Van Der Kemp (1912-2001), éminent conservateur en chef de Versailles de l'après-guerre (1953-1980), s’assura le concours de grands mécènes internationaux, à commencer par celui des Américains2.
Renseignements pris auprès d’une pointure de la conservation de cette époque, il apparait que les lustres de la galerie des Glaces étaient toujours disposés sur trois rangs et pas seulement lors des fêtes, comme en témoignent la vue de Sébastien Leclerc, datée des années 1680, au temps du mobilier d’argent, ainsi que toutes celles montrant la galerie aux XVIIIe siècles, notamment durant les soirées de jeux. Un usage qui fut perpétué au XIXe siècle (réceptions de la reine Victoria en 1855 et des souverains européens, de 1856 à 18673).
Si effectivement les lustres étaient montés et démontés après emploi dans les résidences royales par le service des Menus-Plaisirs, il apparaît qu’à la fin du XVIIIe, cet usage s’était perdu et que les lustres demeurèrent en place afin d’éviter les manipulations continuelles, périlleuses et coûteuses.
J’eus l’occasion d’étudier le sujet à propos des lustres de l’église royale Saint-Louis de Versailles, actuelle cathédrale. Montés et démontés après les cérémonies, de 1774 à 1785, ces lustres demeurèrent en place à compter de cette date. Ils participaient du goût du luxe du moment aux côtés des candélabres, tapis et étoffes précieuses4.
Tour à tour lieu de fêtes et de cérémonies, salle des pas perdus et passage obligé des souverains à la chapelle royale lors des messes quotidiennes, la galerie des Glaces était un lieu de représentation autant que de pouvoir, où la cour se pressait pour admirer les cortèges royaux et princiers ou celui des ambassades étrangères.
Le parti d’une seule rangée de lustres dans la galerie, adopté durant l’été 2025, est, par conséquent, parfaitement inadapté et d’autant plus singulier qu’on le justifie, dit-on, pour mieux apprécier le décor de Charles Le Brun, qualifié de "véritable sixtine de l’art français".
Il apparait, en vérité, comme un souhait de renouer avec un état républicain, celui de la IIIe, dont on célèbre cette année les 150 ans avec la réouverture de la salle du Congrès et le réaménagement des espaces périphériques de l'aile sud5.
On rappelera aux tenants de ce parti que la galerie des Glaces n’est pas qu’un plafond mais aussi une architecture, celle de Jules Hardouin-Mansart ; des glaces, bien sûr, produites par la manufacture royale de Saint-Gobain, créée en 1665 afin de concurrencer les productions vénitiennes ; de superbes ornements de bronze et de stucs dorés par les meilleurs sculpteurs et orfèvres du temps (Jacques Buirette, François Lespingola, Pierre Ladoyreau6) ; un mobilier, dont les fameuses torchères de Jacques Gondouin (1737-1818), 24 au total, commandées en 1769 en vue du mariage du Dauphin, futur Louis XVI, avec la Dauphine Marie-Antoinette d'Autriche, l’année suivante. Torchères qui furent reproduites par Gérald Van Der Kemp et Pierre Lemoine d’après les modèles originaux, longtemps présentés dans la Grand Appartement (salon d’Apollon)7.
En supprimant les deux rangées latérales de lustres présentes depuis 45 ans, les tenants de ce parti se trompent à d’autres égards :
-sur un plan pratique, ils assombrissent la galerie durant les périodes automnale et hivernale, lors des réceptions officielles et autres évènements dans la galerie8.
-les effets de faste et de prestige, qui sont l’expression et l’image de Versailles, se trouvent nettement amoindris.
-le respect dû aux mécènes qui contribuèrent à l’ambitieuse restitution de 1980, ainsi qu’à la mémoire de ceux disparus, le nom de tous figurant sur les lustres, retirés ou encore en place. Une injustice donc pour beaucoup.
Soulignons enfin la faiblesse scientifique de la page internet9 et du communiqué de presse du nouvel état, nullement justifié par une vue d'Ancien Régime attestant le bienfondé du parti adopté, preuve de la fantaisie de certains conservateurs de nos jours. Une fantaisie qu’il est aussi loisible d’apprécier dans la transformation continuelle, et pas toujours à propos, d’autres espaces du château10.
On espère que l’on se rendra vite compte de l'erreur commise et que le parti des brillants Van Der Kemp, Lemoine et autres, était finalement le bon.
On ne peut réduire, en effet, la galerie des Glaces au seul plaisir de la vue d’un plafond !
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1.Un état qui répondait parfaitement à celui extérieur des jardins, restés dans leur état Louis XVI (1774-1776), démantelé dans les années 90 pour un pseudo-état Le Nostre.
2.Sa seconde épouse, rencontrée en 1958, était américaine. Un rapprochement américain pas toujours bien vu du sérail français d’alors.
3.https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_visites_officielles_au_ch%C3%A2teau_de_Versailles
4.Voir mon ouvrage sur la cathédrale Saint-Louis, Somogy, 2009, p. 56.
5.Ouverture exceptionnelle de la salle du Congrès | Château de Versailles
6.On doit à cet orfèvre les superbes trophées suspendus en bronze doré des trumeaux.
7.Il n’est fait aucune allusion à cet artiste réputé à l’évocation de ces torchères dans les interviews.
8.L'intensité des lustres est réglée sur celle de l'éclat d'une bougie.
9.https://www.chateauversailles.fr/presse/restaurations/galerie-glaces-revelee#redecouvrir-lepopee-de-louis-xiv-peinte-par-charles-le-brun
10.On pense notamment à ceux des appartements Dauphin-Dauphine et de Mesdames au rez-de-chaussée du château par le décorateur Jacques Garcia dans les années 2010, revus depuis.
Découvrez l'incroyable histoire du canal de l'Essonne qui, du XVe au XIXe siècle, visa, à la suite du canal de Briare (1605-1642), cher à Henri IV et à Sully, à lier la Loire à la Seine et à favoriser le commerce des régions limitrophes (Gâtinais, Hurepoix, Beauce, Orléanais).
L’association Mémoire et Patrimoine Vivant de Corbeil-Essonnes s’est livrée en 2023, en la personne d’Yves Morelle, à la réalisation d’un beau documentaire intitulé : "Un canal s’est perdu. L’impossible histoire du canal de l’Essonne (1634-1831)".
En vous positionnant sur 27’47’’, vous trouverez mon intervention sur le projet de Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne en 1759-67. Projet que j’eus l’occasion d’étudier à la fin des années 1990 dans le cadre de ma thèse sur l’architecte-ingénieur du roi, soutenue en 2004.
Ce canal fit l’objet d’une ample publication circonstanciée en 2018 sous le titre : "Les canaux de la Juine, de l’Essonne et de la Rimarde au XVIIIe siècle. Projets de Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne et consorts (1759-1767)", Essonne et Hurepoix, Bulletin de la société historique et archéologique de l’Essonne et du Hurepoix, n° 87, année 2017, 2018, p. 7-70.
Vous trouverez aussi dans ce documentaire l’évocation du château de Montauger, propriété du Département de l’Essonne et, au XVIIIe siècle, de Gilbert-Jérôme Clautrier, 1er commis du Contrôle général des Finances, intime de Mansart de Sagonne. Clautrier soutint financièrement ce projet de canal alors que l'architecte réalisait pour lui la reconstruction et l'augmentation du château (1759-1762).
Un aspect méconnu de l’histoire de l’Essonne. Histoire à laquelle j’ai passablement contribué ces vingt dernières années par diverses recherches que vous retrouverez aux Archives départementales de Chamarande.
Soucieux de permettre à tous ceux qui souhaitent s’informer valablement sur le grand ornemaniste rocaille Nicolas Pineau (1684-1754), il m’a semblé judicieux, en ce 18 juin, de mettre en ligne la partie de ma thèse* relative au sujet.
Les amateurs du style rocaille et des Pineau y trouveront les éléments établis et identifiés par mes soins, il y a bientôt 30 ans, ainsi que ceux portés dans les notes de bas de page de l’examen critique de l’ouvrage peu scientifique et plutôt fantaisiste Nicolas Pineau 1684-1754. Un sculpteur rocaille entre Paris et Saint-Pétersbourg, paru en mars dernier. Examen mis en ligne le mois dernier sur ce site.
Un accès direct à l’information sur Nicolas et Dominique Pineau et leurs liens véritables avec l’architecte Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne plus que nécessaire pour mieux appréhender la gravité de ce qui est porté dans cet ouvrage.
Des éléments de réflexion et de méditation pour distinguer en effet ce qu’est une vraie démarche scientifique de ce qui ne l’est pas.
Les amateurs trouveront également le début de mon étude sur un autre ornemaniste rocaille important du milieu XVIIIe : Jules-Antoine Rousseau. Une invitation supplémentaire à consulter ma thèse et à mesurer l'ampleur de la tâche accomplie.
Les fichiers texte et notes sont établis séparément afin de permettre une lecture croisée.
Bonne lecture !
  
Etude Pineau, thèse, 2004, t.I, pdf    
Etude Pineau, thèse, 2004, notes 
*Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne, dernier des Mansart (1711-1778), thèse, 3 tomes, 2004.
Consultable à : -Paris, INHA ;
-Versailles, Bibliothèque municipale (version intégrale) et Archives communales (version texte seulement).
               
On devrait toujours faire des expositions et des ouvrages avec les spécialistes du sujet. Cela éviterait les erreurs d’appréciation et d’induire en erreur le public et le lecteur.
Retour sur l’exposition Rococo & Co. De Nicolas Pineau à Cindy Sherman qui vient de s’achever et l’ouvrage Nicolas Pineau (1684-1754). Un sculpteur rocaille entre Paris et Saint-Pétersbourg, paru en mars dernier, du Musée des Arts Décoratifs.
Pauvres Pineau !
Analyse circonstanciée ici :  
pdf
Le fonds D’Argenson de Poitiers ne devrait jamais être négligé.
Découvrez mon propos d'avril et l'addendum de mai sur l’ouvrage Ange-Laurent La Live de Jully. Un grand amateur à l’époque des Lumières, Paris, novembre 2024.
Bonne lecture !
  
analyse, avril 2025         
addendum révisé, mai 2025
   
Il est des publications qui sont un honneur, une distinction, une récompense.
À une période où les récompenses sont attribuées parfois sur on-ne-sait quel critère, être publié par une université étrangère et son éminent comité scientifique* est en effet des plus flatteurs : c’est la reconnaissance de son travail hors de France.
Parution, ce mois de mars 2025, dans Modus Operandi, actes du symposium "História de Arte Hoje" organisé par l’Université de Lisbonne, les 14-16 novembre 2022, de mon article : "Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne à Lisbonne. Un projet stratégique de palais royal pour la diplomatie française" (p. 233-263).
Ce symposium fut organisé en hommage à l’éminent historien et critique d’art portugais, José Augusto França (1922-2021), à l’occasion du centenaire de sa naissance. Lors de mes recherches en 1998, j’eus l’honneur de m’entretenir avec ce spécialiste de la Lisbonne du XVIIIe siècle, fort sympathique et ouvert aux doctorants étrangers.
Le projet de palais royal en question fait suite au tremblement de terre survenu à Lisbonne à la Toussaint 1755, si bien évoqué par Voltaire dans Candide (1759). Si l’on ne dispose pas, malheureusement, des plans et élévations, en revanche, une documentation non négligeable – correspondance diplomatique et des Bâtiments du roi, actes notariés – est conservée.
Souvent abordé par de nombreux historiens ou historiens de l’art (Réau, Cordeiro de Souza, França, Gallet), le sujet ne fut traité que de manière succincte. Il m’appartenait de l’approfondir en établissant les tenants et les aboutissants. Ce fut ainsi l’occasion de faire le point sur la situation artistique et diplomatique des monarchies française et portugaise à la veille de la Guerre de Sept-Ans (1756-1763).
On verra comment Louis XV entendit se servir de sa passion, l’architecture ‒ art ô combien emblématique de l’influence française en ce milieu des Lumières dans le contexte des grands chantiers du règne (place Louis XV de Paris, actuelle place de la Concorde, notamment) – afin de s’allier ou, à défaut, de neutraliser une puissance alliée de l’Angleterre depuis le début du siècle, faisant de ses architectes de véritables agents diplomatiques.
Si le séjour de Mansart de Sagonne en 1756 fut contrecarré par ses prétentions indécentes, la poursuite des secousses et le début du conflit en mai, l’architecte du roi se rendra bien dans la péninsule ibérique plus d’une dizaine d’années plus tard, en 1767-1769, afin de défendre ses projets de canaux en Espagne et de palais royal à Lisbonne. L’intérêt du roi Charles III pour les premiers l’empêcha de pousser plus avant.
On verra aussi comment l’ex-infante Marie-Anne-Victoire d’Espagne, mariée de force à Louis XV en 1721, alors âgée de 3 ans, renvoyée indécemment dans ses foyers en 1725 et devenue reine de Portugal, n’oublia pas l’humiliation subie lorsque le roi de France proposa son aide financière à la couronne portugaise.
Il s’agit là de ma cinquième publication étrangère et de la troisième dans la péninsule ibérique, après celles de Madrid en 2001 ("Archivo español de Arte", n°293) et de Salamanque en 2019 ("Cuadernos dieciochistas", vol. 20).
J’exprime toute ma gratitude à l’Institut d’Histoire de l’Art de la Faculté des Humanités de Lisbonne, ainsi qu’à son comité scientifique, pour cette importante parution.
Les 17-18 et 26 janvier 2025 verront l’inauguration du grand orgue de la cathédrale Saint-Louis de Versailles, après six ans de restauration.
Réalisé en 1760-1761 par Louis-Alexandre Cliquot (1680-1760) et son fils François-Henri (1732-1790), qui le paracheva à la mort de son père, cet orgue de 53 tonnes, classé M.H. en 1906, figure au rang des plus grands instruments liturgiques du XVIIIe siècle au même titre que l’orgue de la chapelle royale du château, œuvre de Robert et Jean Cliquot (1710-1771), respectivement père et aïeul des précédents.
Inauguré aux vêpres du 31 octobre 1761, veille de Toussaint, il fut joué, nous dit L’Avant-Coureur, durant trois-quart d’heure devant Louis XV par son organiste Nicolas-Hubert Paulin (1713-1785).
L’orgue fut restauré à plusieurs reprises au XIXe siècle. Les interventions les plus notables sont celles de : Pierre-François Dallery (1807-1808), son fils Louis-Paul (1828-1829), John Abbey (1838-1839) et, surtout, Aristide Cavaillé-Coll (1859-1863).
Restauré à nouveau en 1901-1902, l’orgue dut attendre 1987-1989 pour que l’on procédât à une nouvelle intervention d’envergure en vue du bicentenaire de la Révolution française. Je me souviens encore de l’inauguration, le 15 octobre 1989, avec le récital de Marie-Claire Alain. L’orgue avait été béni alors par Mgr Jean-Charles Thomas, évêque de Versailles.
La colle employée durant cette restauration entraina malheureusement une dégradation lente des 3248 tuyaux, constatée en 2000. Ce n’est qu’en 2018 que la restauration complète put être enfin engagée. Le remontage des tuyaux, effectué en 2024, avait été entravé en 2020-2022 par le Covid et la restauration de la façade de la cathédrale.
On retrouvera l’historique complet de l’instrument dans mon ouvrage La cathédrale Saint-Louis de Versailles. Un grand chantier du règne de Louis XV, Paris, Somogy, 2009 (p.52-53, 87-88, 126-130), ainsi que la composition complète de l’instrument (p.246-247), avec l’aimable et précieuse collaboration de Jean-Pierre Millioud, titulaire de l’orgue depuis quatre décennies.
Le 18 janvier, à 16h, verra une nouvelle bénédiction de l’instrument par Mgr Luc Crépy, évêque de Versailles.
Premier concert inaugural, le 19 janvier, 15h et le second, le 26 janvier, 15h.
Toutes les informations ici : https://actu.fr/ile-de-france/versailles_78646/video-un-monstre-de-la-musique-est-de-retour-en-la-cathedrale-saint-louis-de-versailles_62115326.html
La réalisation du Parterre d’Eau en l’état actuel, daté de 1684-1685, a donné lieu à bien des spéculations : Stéphane Pincas, Bertrand Jestaz et Thomas Hédin y virent la main de Jules Hardouin-Mansart, quand Alexandre Maral y vit plutôt celle d’André Le Nostre sur la base de documents annotés du fonds de l’Institut de France.
Le nouveau parterre doit être considéré dans un contexte plus large : celui de la main mise progressive d’Hardouin-Mansart sur les aménagements du château à compter de 1678, date du début du vaste chantier en vue de l'installation de la Cour en 1682, dont celui de la Galerie des Glaces (1678-1684) en remplacement de l’ancienne terrasse de Louis Le Vau, de la réalisation de l'aile du Midi (1678-1682), puis de l'Orangerie (1683-1685).
André Le Nostre est alors un homme âgé (65 ans), à la carrière en déclin et dont les créations paraissent plutôt passées de mode au regard de celles, plus spectaculaires, du jeune génie de l’architecture apprécié du Roi-Soleil.
La correspondance de Louvois révèle un homme auquel il confie le choix des antiques, leur installation dans le parc, ainsi que de menus aménagements dans les résidences royales.
Les faits confortent, en effet, l’ascension d’Hardouin-Mansart : en 1681, il devint le Premier architecte du roi et, par là-même, le patron de l’Agence des Bâtiments du Roi, ayant main sur l’ensemble des résidences royales. L’année 1682 vit son anoblissement par Louis XIV, ses lettres de noblesse étant délivrées en septembre. En 1683, Louvois, protecteur d’Hardouin-Mansart, succéda à Colbert, protecteur de Le Nostre, à la tête de la Surintendance des Bâtiments du Roi. En 1684, le Premier architecte est promu intendant des Bâtiments du Roi.
Dès 1678, le secrétaire d’État à la Guerre s’était plu à confronter les deux génies dans les jardins de sa résidence de Louvois, en Champagne, dont il avait confié les remaniements et décors à l’architecte.
En novembre 1683, alors que s'engageait le chantier de l'Orangerie, Louvois ordonna la destruction du Parterre d’Eau, conçu par Le Nostre et Le Brun en 1672. On venait d’installer pourtant, en 1682, les piédestaux des statues commandées en 1674, dites de la "Grande Commande".
Cette décision ne peut être comprise que dans le cadre du conseil d’Hardouin-Mansart à Louvois, l’architecte lui ayant fait prendre conscience que cette série de vingt statues (Quatre Saisons ; Quatre Parties du Monde ; Quatre Éléments ; Quatre Poèmes ; et Quatre Complexions de l’Homme) allaient créer un effet de saturation sur la façade du corps central qu’il avait réalisée en 1678-1679.
Il est clair que l’architecte entendait créer un ensemble harmonieux au droit de cette partie du château et des jardins.
Ajoutons que le grand bassin à oreilles, qui occupait alors tout l'espace, engendrait une difficulté de circulation qui ne pouvait se faire que sur les côtés seulement.
Hardouin-Mansart proposa ainsi deux miroirs d’eau, avec allée centrale, venant refléter sa nouvelle façade à l’instar des glaces de sa Grande Galerie, le tout étant achevé en juin 1684.
On peut penser légitimement que Le Nostre proposa des solutions pour cette nouvelle version du parterre - la 4e depuis les années 1660 - dont l’agrément des bassins à l’aide de groupes sculptés comme il le fit, dans les années 1670, pour les bassins des Quatre Saisons en collaboration avec Le Brun. Ceci explique l’attribution donnée, parfois, au grand jardinier pour ce parterre par ses partisans.
Mais le goût de la simplicité de Louvois - qui était aussi celle préconisée par Hardouin-Mansart comme il le démontra aux bassins des Saisons à compter de 1681 - ainsi que l’abandon du projet de l’aqueduc de Maintenon au début de 1688, engagé en 1686, firent abandonner l’installation des groupes centraux envisagés. Ils avaient pour thèmes : La Naissance de Vénus et Le Triomphe de Téthys, les modèles en plâtre ayant été réalisés en 1686 précisément.
Les bassins demeurèrent donc dans l’état figuré en 1685, date de début d’exécution des seize figures allongées des fleuves de France, de leurs affluents et de nymphes avec enfant. Fondues en bronze par les frères Keller, elles furent progressivement installées jusqu’en 1691.
Ces figures furent complétées, en 1686-1690, par huit groupes d’enfants, confiés aux fondeurs Aubry, Bonvalet, Scabol et Taupin, disposés aux angles des bassins.
En concevant de telles figures (allongées ou basses), Hardouin-Mansart offrait la visibilité souhaitée par son protecteur sur la façade du corps central.
La correspondance entre Louvois et Hardouin-Mansart indique également que le Parterre d’Eau se vit compléter, de part et d’autre, en 1684, de cabinets d’animaux dits "Fontaine du Pont du Jour" et "Fontaine du Soir", confirmant à nouveau le rôle majeur joué par l’architecte dans la reprise en main des jardins de Versailles à ce moment.
Sa position se vit conforter par l’acceptation, la même année, de son projet de Colonnade au droit du Bosquet des Sources de Le Nostre et de celui de Grande Cascade, envisagé derrière la Bosquet du Chêne Vert, au détriment de celui du jardinier.
Ce dernier projet fut abandonné, à son tour, tant pour des raisons de coûts que de difficultés d’approvisionnement d’eau, quoique les matériaux aient été commandés comme l’avaient été les groupes centraux des bassins du Parterre d’Eau.
En résumé, si l’on ne peut exclure totalement la collaboration de Le Nostre dans le projet du Parterre d’Eau aux côtés d’Hardouin-Mansart, c’est bien celui-ci qui, de par ses fonctions de Premier architecte, en assura la conception et la maîtrise d’œuvre. Le goût prononcé du roi pour ses créations, souvent conçues avec lui ou suivant ses ordres, devait conduire Le Nostre à se retirer définitivement du métier en 1693.
Ajoutons enfin que le remplacement de certains bosquets de Le Nostre par Hardouin-Mansart (Salle des Marronniers, Bosquets des Bains d'Apollon et de l'Obélisque) et la poursuite de la modification des jardins et bosquets par lui jusqu'à sa mort en 1708, voire au-delà (bassin de l'Ile-aux-Enfants, 1704-1709), suivant le souhait du roi, tant pour des raisons de coûts d'entretien que d'évolution du goût ou d'économie d'eau, on se rend compte combien la restitution d'un prétendu "état Le Nostre" des jardins de Versailles, opérée ces dernières années, parait bien chimérique*.
Si Le Nostre fut, en effet, le concepteur des jardins de Versailles, il n'en fut pas le seul auteur, l'action d'Hardouin-Mansart couvrant l'autre moitié du règne de Louis XIV.
*Chimère : Qui ne correspond pas à la réalité, la réalité historique en l'occurence.
Références bibliographiques
Stéphane Pincas, Versailles, un jardin à la française, Paris, 1995, p. 82-99.
Architecture et Beaux-Arts à l’apogée du règne de Louis XIV. Édition critique de la correspondance du marquis de Louvois, surintendant des Bâtiments du roi, arts et manufactures de France, 1683-1691, Service historique de la Défense à Vincennes, Raphaël Masson - Thierry Sarmant (dir.), 2 vol., Paris, 2007-2009.
Bertrand Jestaz, Jules Hardouin-Mansart, 2 tomes, Paris, 2008, t. I, p. 159-161, 209-213, 246-250.
Thomas Hédin in Jules Hardouin-Mansart 1646-1708, Paris, 2010, p. 232-240.
Alexandre Maral in André Le Nôtre en perspectives, cat. expo., Patricia Bouchenot-Déchin – Georges Farhat (dir.), Versailles, 2013, p. 278-281.
Alexandre Maral, Catalogue des sculptures des jardins de Versailles et de Trianon en ligne, juillet 2021.
C’est un des merveilleux sujets que j’eus à traiter au cours de ma carrière scientifique.
Personnage central des échanges franco-germaniques et de l’amitié franco-allemande au milieu du XVIIIe siècle, par ses prétentions aux trônes de Bavière et du Palatinat, le duc Christian IV des Deux-Ponts (1722-1775), prince palatin, fut, de 1750 à 1764, l’intime de Louis XV et, surtout, de Madame de Pompadour qui le trouvait fort séduisant.
Prince francophile et francophone, souverain d’une de ces principautés éparses du Saint-Empire romain germanique, il était, "aussi français que s’il était né au milieu de Versailles", nous dit le duc de Zuckmantel. Très apprécié à chaque séjour, il fut beaucoup regretté à son décès en 1775.
Intime de Marc-René de Voyer d’Argenson, marquis de Voyer (1722-1782) – personnalité éminente des arts au XVIIIe, aussi réhabilitée par mes travaux ‒, le duc commanda à Mansart de Sagonne, le château de Jägersburg (1752-1756), réplique du Grand Trianon de Jules Hardouin-Mansart. Cette demeure était aussi inspirée des projets de palais de Blondel comme exposé en 2012 dans mon article de la revue du Centre historique allemand à Paris (Francia, n° 39, p. 135-165).
J’eus l’occasion de prolonger le propos en 2018, sous l’angle de la rivalité avec Pierre Patte, cette fois, dans Saarpfalz. Blätter für Geschichte und Volksunde, revue historique de Sarre (n° 3, 2018, p.37-51).
Réhabilité par Wilhelm Weber en 1987 dans son remarquable ouvrage Schloss Karlsberg, le duc des Deux-Ponts demeurait inconnu en France jusqu’à mes recherches dans les années 1990. Une fois encore (après Voyer d’Argenson et Biarritz), l’intérêt porté à ce personnage ignoré me valut l’exploitation éhontée de mes travaux par une citation à minima d’un universitaire. La rançon du succès, diront certains. Si Coco Chanel déclarait aimer être copiée, il n’en est pas de même pour moi. 
Pour mieux apprécier l’importance et la variété des échanges entre Deux-Ponts et la France de Louis XV (diplomatie, culture, économie, etc), il convient de se reporter aux missives du duc avec la Pompadour. La publication de cette abondante correspondance est un projet que je caresse depuis fort longtemps. Je lance ainsi un appel à l’attention des institutions historiques allemandes ou américaines en vue de sa publication dans un bel ouvrage.
Pour mieux cerner l’importance et la considération qu’on portait à ce prince allemand à Versailles sous Louis XV, son peintre Mannlich rappelle comment « l’évocation du nom de mon souverain produisit un effet magique » lorsqu’il s’agit de lui ouvrir le Petit Trianon.
L’allée principale de cette résidence, ô combien célèbre, fut plantée, rappelons-le, de peupliers sur le modèle de celle de Jägersburg, et non d’ormes ou de tilleuls suivant la tradition française d’alors. Les échanges entre le duc et la Pompadour cessèrent à la mort de celle-ci en 1764.
On comprendra donc l’intérêt particulier de publier cette correspondance afin de mieux cerner les échanges et influences entre France et Allemagne au Siècle des Lumières.
Un grand merci pour vos contacts et recommandations.
Il est des sujets d’histoire ou d’histoire de l’art qui peuvent paraitre anecdotiques mais qui se révèlent, à l’analyse, loin de là.
Prenez le projet d’acquisition par Louis XV du château de Maisons-Laffitte pour Madame de Pompadour en 1747 : vous découvrirez combien ce projet était ancien chez les Bourbons et qu’il en fut à nouveau question pour Madame du Barry.
La tradition Mansart voulut que le Bien-Aimé fît appel à Mansart de Sagonne. Si les projets ne sont pas conservés, ils nous sont néanmoins connus par la description faite par Jacques-François Blondel dans le tome III de son "Cours d’Architecture" en 1772.
J’eus l’occasion d’évoquer les rapports particuliers entre Blondel et le dernier Mansart dans les actes du colloque Blondel, tenu à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine, en 2017. Actes parus aux éditions Mardaga, à Bruxelles, en 2022.
La perfidie du théoricien à l’égard d’un architecte qu’il jalousait se confirme à nouveau : demander ses plans pour mieux les critiquer et valoriser François Mansart, "le Grand Mansart", au détriment du dernier membre de la dynastie !
On y verra peut-être aussi une critique sous-jacente du choix du roi comme on le fit en 1754 à l’occasion de celui de Mansart de Jouy pour le portail de Saint-Eustache à Paris. L’envie face au talent est éternelle comme on sait.
Enfin, il est intéressant d’observer comment le château de Maisons, par ce projet de modifications, devait marquer Mansart de Sagonne à Asnières. Il est question une fois encore, en conclusion, du marquis de Voyer, personnage décidément incontournable dans le champ de l’architecture et des chevaux au siècle des Lumières.
Article en ligne téléchargeable ici (cliquez sur pdf).
Bonne lecture !
C’est avec un plaisir particulier que l’on peut découvrir en cette année 2024, deux réalisations phares des derniers Mansart à Paris enfin restaurées : les portails des églises Saint-Eustache et des Carmes-Billettes au Marais (temple protestant depuis 1812).
Œuvre de Jean Mansart de Jouy, la première fait partie des grands projets religieux de la capitale au XVIIIe siècle, après le portail de Saint-Sulpice par Servandoni, les églises Sainte-Geneviève (Panthéon) par Soufflot et de la Madeleine par Contant d’Ivry.
Témoin de l’importance accordée à ce projet, la première pierre fut posée en mai 1754 par le jeune duc de Chartres, futur Philippe-Égalité, alors âgé de sept ans tandis que le projet était dédié au duc d'Orléans, son père. Cette cérémonie intervenait à trois mois de distance de l’inauguration, le 25 août, jour de la saint Louis, d’un autre projet phare de l’architecture religieuse du règne de Louis XV : celui de l’église royale Saint-Louis de Versailles, réalisation emblématique de Mansart de Sagonne, superbe vaisseau au-dessus du Potager du Roi. Les derniers Mansart étaient alors, on le voit, au comble de la renommée.
Marguillier de la fabrique et intime du curé, l’abbé Secousse, Mansart l’Aîné ‒ comme on le dénommait alors pour le distinguer de son cadet ‒ se fit fort d’inscrire son beau portail dans un projet urbain ambitieux, formé d’une vaste place à colonnes doriques venant prolonger celles au bas du portail, d’un presbytère et d’un vicariat sur le flanc droit, à l’angle des rues des Prouvaires et Trainée, aujourd’hui disparues. Cet ensemble entendait constituer, rive droite, le pendant des portail et place Saint-Sulpice. Aucun des deux projets urbains ne vit finalement le jour.
La guerre de Sept-Ans (1755-1763) entrava en effet leur réalisation et non le décès supposé de l'architecte comme on le crut longtemps. Par mesure d’économies, le second registre du projet de Mansart de Jouy, tel que figuré par Jacques-François Blondel, dut être modifié. L’architecte avait opéré la synthèse du projet envisagé par Le Vau au XVIIe siècle, reproduit par Sophie Descat dans son article du Bulletin monumental en 1997 (t.155, n° III), à savoir deux tours ajourées d'esprit gothique, reliées par une balustrade, coiffant les porche et loggia à colonnes de Servandoni à Saint-Sulpice, au centre. Un portail qui confirme la conversion de notre Mansart à l’esthétique néo-classique naissante, contrairement à son frère cadet.
La reprise du chantier après 1763 aboutit à la réalisation des parties hautes dont la modeste tour gauche par Pierre-Louis Moreau, architecte du roi, bien en-deçà des celles prévues par Mansart de Jouy. Depuis le début du chantier, l’architecte était décrié par la critique parisienne, à commencer par Pierre Patte, farouche rival des derniers Mansart.
La seconde réalisation religieuse est un des édifices phares du Marais.
Sise entre le BHV et les Archives Nationales, l’église des Carmes-Billettes fut réalisée en 1754-1758, d’après un beau projet aquarellé daté de 1752, approuvé par les religieux en 1753 et identifié par mes soins dans le Minutier central des notaires parisiens, aux Archives Nationales, à la fin des années 1990.
Ce projet révisa partie des plans et élévations commandés en 1744 par les Billettes à Mansart de Sagonne, remaniés par lui en 1747 et 1750 afin de satisfaire les exigences de la paroisse voisine et rivale de Saint-Jean-en-Grève qui entravait chaque fois le projet de reconstruction. Les religieux n'avaient pas versé en effet plus de 3 000 livres à l’architecte pour que son projet restât lettre morte.
Attribuée faussement au Frère Claude, dominicain du noviciat général de Paris, auteur de Saint-Thomas d'Aquin, en raison de restaurations effectuées par lui en 1779, l’église des Billettes est un édifice d’importance à bien des égards :
-elle demeure en effet la dernière église conventuelle de la capitale à disposer de son cloître (XVe siècle).
-sur le plan architectural, elle revisite le concept d’église-halle prolongée d’une rotonde tel que conçu, à plus grande échelle, par Hardouin-Mansart aux Invalides. Mansart de Sagonne doubla dans la nef les tribunes latérales de son aïeul à l’église Saint-Louis, destinées aux femmes.
-des éléments de Saint-Louis de Versailles, cette fois - édifice que Mansart de Sagonne érigeait au moment de la conception du projet des Billettes -, se retrouvent, à savoir : la voûte à doubleaux et pénétrations ; les pots à feu latéraux, disposés ici sous forme de reliefs ; le motif des palmes, symbole de martyr, fréquent dans l’architecture religieuse des Mansart (tribune d’orgue de la cathédrale de Versailles, par exemple), de chaque côté de l'élévation.
-enfin, l’architecte adopta la solution originale - unique à Paris - d’un portail élégant n’empiétant pas sur la rue, étroite alors, l’inscrivant dans la continuité des élévations du couvent envisagé, lesquelles sont restées inachevées à gauche.
Inscrit à l'Inventaire supplémentaire des Monuments Historiques en 1988, l’édifice fut classé en février 1990.
On trouvera de plus amples détails sur les conditions particulières de sa reconstruction au XVIIIe siècle dans mon article publié en 2016 dans le Bulletin de la Société de l’Histoire de Paris et de l’Ile-de-France, année 2014, p. 95-106. Une version intégrale est disponible dans la rubrique Articles de ce site.
Longtemps demeurées sous échafaudages et en piètre état, les portails de Saint-Eustache et des Carmes-Billettes constituent donc deux réalisations religieuses uniques des derniers Mansart à Paris et qui peuvent être appréciées désormais à leur juste valeur.